1996
triptyque fermé 111x58 cm
1996
1991
1996
1996
1992
1993
1994
1994
1993
1994
1992
Et les portes s'ouvrent. Grouillance, magnificence ; la fresque est généreuse, bariolée. Déployée comme un livre d'images, articulée comme un retable, frémissante comme un vitrail, elle force la lecture à plusieurs voies : l'appel du récit, la tentation du détail, l'émerveillement des reconnaissances ; l'immersion dans un fabuleux bazar où les symboles façonnés de brics et de brocs de ce monde peuplent l'iconographie de nos rêves ; Christophe Conan interroge les mystères du ciel avec l'argile et le fer de la terre. Voici le Tohu-Bohu des ténèbres, bouleversé d'une tectonique grondante ; le feu force sa voie qui n'est pas encore lumière. Voici la vague, bouleversée d'un vent qui n'est pas encore nommé souffle, mais dont le mouvement mosaïque dessine déjà le nombre d'or, figuration transtemporelle, nature non altérée d'histoire. Et voici la forêt, encore sèche, et pourtant marécageuse, où le rouge espère le nom de fleur, où la liane attend la sève. Mémoire fossile ou rêve à venir ? Ankylose du temps, c'est la tourbière, lieu de toutes les naissances et de toutes les renaissances : volet ouvert, voici qu'émerge à la lumière de la conscience, les souvenirs de ce réservoir caché ; l'effacé surgit. Mouvement. Voici la mutation. L'homme est là qui s'érige, sait, fait. Et il désire ; il représente, trace, s'imagine, se joue. Il dit.
Et voici la parole, qui transmute le tohu-bohu : voici la terre et la vie organique, les astres et les poissons, les serpents de couleurs et la lumière et l'homme. Voici l'Histoire. Jour un. Et voici la parole, qui doute, qui converse. Image centrale de Job et de ces trois amis avançant les figure de la vie et de la mort sur l'échiquier du Bien et du Mal. Rouages plus que roueries ; innocence à l'épreuve ; conscience. La sève retrouve son chemin, l'herbe pousse. Et l'homme voit : des mécaniques volantes, formidables messagers aux orbites tournoyantes, fustigeant la nuit d'un déluge de couleurs. Les vaches s'affolent. Le feu et la mer s'émacient jusqu'au signe, la sève se retire, l'arc-en-ciel se disloque : noir et blanc. Ressourcement.
Et voici la lumière nouvelle. Bleu, rouille, argent, l'annonce de la route aimante s'inscrit autour d'un Christ en clous : élan synthétique, unitaire. Voici l'homme. Et il voit : vingt quatre figures hiératiques, fils de ferraille rafistolés, portant tendresse à l'oeil. Ils ne font rien. Ils sont là, en tension squelettique. Et voici les anges couronnés d'auréoles, ils tiennent un livre en main et déploient des icônes : bleu-rouille-or, les âmes-oiseaux sont des avions dans la tourmente, blanc-gris, c'est le damier du purgatoire. Le ciel est bleu, l'eau est en feu. Rouge et noir. C'est l'heure des comptes : le 1er et le dernier. A chacun sa case : les grenouilles rutilantes et les momies crâneuses sur leurs étagères, la bête dans le lac de feu, les arbres à la tourbière ; la mécanique enrayée, l'attente. Alors vient l'arc-en-ciel, délivrant le violet d'une ineffable revivance.